top of page

POÉSIE

La grande sieste

La grande sieste - linogravure

 

En 2011, je commence la pratique de la gravure et je débute une série où la figure humaine, le végétal, l’animal et le minéral entretiennent des liens étroits jusqu’à entremêler intimement leurs natures. D’homme-oiseau en femme-feuille, une danse des métamorphoses s’offre au regard dans l’austérité choisie du noir et du blanc, parfois rehaussée de couleurs à la gouache.

Puis, cherchant une forme partageable à ma poésie cantonnée jusqu’alors à mes carnets ou à mes lettres, je crée les Éditions de Morphée en 2012 en publiant un premier recueil de poèmes intitulé « Rêveries » où j’insère en illustration mes quatre premières gravures. S’ensuivent 6 autres recueils, un coffret, des livres pauvres, des leporellos, un livre d'artiste, une gravure/sculpture...

Les gravures et les petits livres que je fabrique sont ce que l’on appelle une petite édition d’artiste. Je corrige mes écrits, assemble les textes qui peuvent aller ensemble, les mets en page, les imprime feuille à feuille, mesure, coupe, plie, encarte, couds… Puis j’examine le résultat sous toutes les coutures jusqu’à ce moment d’euphorie passagère où je me sens autorisée à publier ces multiples aspects d’un rêve éveillé, ce débordement de ma nuit...

Éditions de Morphée

 

... pour les multiples formes

                                      de l'homme

          dont tu rêves l'embrassade

                                   à toute heure du jour

                                                et de la nuit

          souvent blanche car il t'oublie

 

Extraits de "Danse avec le Vent" 

Publication juillet 2023

 

J'écris pour me lire

 

 

M'apprendre par cœur car je n'ai pas de mémoire

J'écris pour me savoir

 

Les mots donnent corps à l'invisible vide

Que j'habite comme le vent la plaine

 

Au plus fort de l'inconnu

Qui me hante à l'infini

Je souffle en continu

Les atomes contradictoires

D’une parole qui me constitue

Une

Plutôt que mille

 

Le silence me dissémine

 

 

 

 

J'habite une région de pluie

qui brouille la vue comme un écran de larmes

 

Pluie pluie pluie

Des kilomètres de pluie

Des jours et des heures et des jours

De pluie

Nous finirons ratatinés

Rabougris comme de vieilles noix ravinées

Ramassées tout au fond de leur eau de pluie pluie pluie

Des kilomètres de nuit en plein jour

Saoulée de gris gris gris

Quelle danse pour sonner le glas de la pluie ?

 

Pluie pluie pluie

Non je ne pleure pas

Pluie pluie pluie

Je crie ma soif sèche de sa morsure à lui lui lui

L’astre chaud du jour qui se déplie là-haut tout là-haut

Contre ce désastre de la nuit nuit nuit 

Tout le long du jour sans lui lui lui

 

 

 

 

 

 

Rêve de la source

 

J'avance dans un paysage d’été, vert et boisé, lorsque je découvre une fontaine. Il y a un passage étroit sur le côté, je m’y faufile et commence à descendre le long d’un escalier de pierre hélicoïdal, comme dans un phare à l’envers.

Je descends tout en tournant dans l’iridescente lumière d’un arc-en-ciel ; il jaillit au ralenti du sable fin et blanc du sol de la fontaine. Le sable coule, de source clair, entre mes doigts ouverts jusqu’aux pieds.  Je baigne dans la lumière chatoyante de la source arc-en-ciel. Au dessus de ma tête, la surface de l’eau joue avec le miroitement du soleil et le feuillage diapré de la forêt. Constellation d’un plein jour.

 

 

 

 

 

Une vie de rêve

 

 

De la miniature à la fresque

Les premières peintures         

Donnent la mesure des extrêmes

- La vie qui viendra -

Sans oublier d’inviter à demeure

La poésie familière du vertige

Garde-fou de mon cri

 

Je travaille

À la création d’obstacles sur mesure

J’aime gagner ma vie à la compliquer

D’amis invisibles au grand jour

De dialogues de sourds

Avec des interlocuteurs muets

D’expositions de peinture

Aux cimaises de mes châteaux andalous

 

 

Une vie de rêve

Où mes larmes

Mélangées au pigment

 

Soulignent d’écarlate

Mes mots chantés à nu

 

 

 

 

Peintre en herbe

 

 

Dans ma prochaine vie, je serai grande

Je peindrai de l’herbe

J’habiterai au bord de la Méditerranée

J’élèverai des cailloux

Que les enfants s’amuseront à jeter dans la mer

Turquoise

Sans penser à rien

 

 

 

 

 

 

 

 

Tumulus

 

De mousse vêtu

Antre charnu de la terre

J’aimerais comme sépulture

Cette maison de fée

Au parfum de terre mouillée

L’été

De mousse frottée

L’automne

 

Une table ronde

Lourdement posée sur l’entrée

De ma dernière maison

Pour donner aux vivants

Toute l’ampleur du mystère

Sa saveur

Son odeur

Sa rondeur

 

Aux petites bêtes

Offrir

Une verte prairie pour courir

Faire leur nid

L’amour

Et des petits

 

Danser une dernière fois

Dans mon cercle magique

Puis

D’un bond

 

M’envoler

 

Pour de bon

 

 

 

 

Automne

 

 

Dans la ronde des jours

La sève monte

Et puis descend

Gagne les souterrains

Ombreux

À la lumière diffuse

De l'antre de la vie

Autre

 

Pays de mes racines

Sous la terre c'est le monde à l'envers

Je regarde l'eau

Comme un horizon sens dessus dessous

 

L'herbe verte et les roches nues

Flottent dans l'azur

Il y a un petit tas de ruines

 

 

desquelles a poussé un arbre

à la haute ramure

 

d’où j’épouse le vent

en vigie solitaire

 

consignant les mouvements d’une vie

dans l'écorce de son tronc

J'habite cet arbre de poète

 

 

à la cime dans la brume

d'où je continue à défier

celui qui tire sur le fil

de mon pull effiloché

bottom of page